Voici un nouvel exemple des carences de l'État qui décentralise le stationnement payant en le confiant aux Métropoles qui mettent en place un dispositif avec l'aide de sociétés privées sans se préoccuper en amont des conséquences que cela peut avoir sur le quotidien des personnes en situation de handicap ou âgées titulaires de la carte européenne de stationnement ou de la carte mobilité inclusion. 

Heureusement, à Toulouse, nos associations ont été consultées certes tardivement, mais consultées. Ce qui a abouti au courrier recommandé du CIAH 31 ayant pour objet : Réforme du stationnement sur la Metropole : demande d’adaptation totale du dispositif aux droits des personnes titulaires des Cartes Européennes de Stationnement ou Cartes Mobilité Inclusion -stationnement. Courrier qui s'oppose à la verbalisation automatique du stationnement payant qui ne tient pas compte de ce public.

Télécharger ou lire le courrier du CIAH 31 à Toulouse Metropole: 

https://www.pepsup.com/resources/documents/ARTICLES/000/002/072/20723/DOCUMENT/CIAH31_180116_lettre_RAR_a_TM_refus_LAPI_videoverbalisation_et_prob_titulaires_CMI-CES_vdef_avPJ.pdf

Et dans cette affaire, et dans certaines situations, il est toujours intéressant de se plonger dans la chronologie des faits.

À lire l'article de Faire Face du 26 janvier 2018 qui titre "L’automatisation des contrôles menace la gratuité du stationnement pour les personnes handicapées", on pourrait croire que nous avons la chance en France d'avoir l'APF, Association des Paralysés de France, qui sait se mobiliser et monter au créneau quand c'est nécessaire. Ce qui est illustré par le lien vers le courrier du président de l'APF au ministre de l'intérieur en date du 15 janvier dernier.

Malheureusement, l'histoire est un petit peu différente de ce que décrit Faire Face, journal qui est pourtant composé d'un certain nombre de journalistes de qualité, mais qui ont certainement le défaut d'être un peu trop lié à l'APF qui est leur vrai patron.

En effet, il est dommageable que le journaliste qui a fait tout le travail de recherche et d'enquête sur le sujet et de manière extrêmement fouillée ne soit absolument pas cité. C'est pourtant lui qui a interrogé la CNIL et vérifier son rapport sur le dispositif LAPI. Alors rendons à César ce qui appartient à César, et je vous invite à lire l'excellent article de Laurent LEJARD dans Yanous en date du 5 janvier dernier : 

Nouvelles menaces sur le stationnement.
  La réforme du stationnement payant entraîne une remise en cause du droit à la gratuité pourtant garanti par la loi, du fait de l'automatisation du contrôle par des véhicules lecteurs de plaques d'immatriculation. Enquête

 http://www.yanous.com/news/topflop/topflop180105.html

Il faut savoir que aussi c'est Laurent LEJARD qui a obtenu une réponse du ministère de l'intérieur, et plus précisément de la mission interministérielle pour la décentralisation du stationnement payant, le 12 janvier au sujet du dispositif, ministère qui a indiqué :
"
La décentralisation du stationnement payant, applicable depuis le 1er janvier 2018, ne remet pas en cause la gratuité du stationnement accordée au titulaire de la carte de stationnement ou de la carte mobilité inclusion (ou à la tierce personne l'accompagnant).
- La réforme du stationnement payant est une réforme de décentralisation. Il revient donc aux collectivités de l'appliquer conformément aux textes en vigueur. Si certaines d’entre elles décident de mettre en oeuvre des dispositifs de traitement de données personnelles et de recourir à des technologies telles que l'utilisation de véhicules dotés de systèmes de lecture automatique des plaques d'immatriculation (LAPI), elles doivent le faire dans le respect des recommandations que la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) a publiées le 14 novembre 2017.
- Lors de la phase préparatoire de la mise en œuvre de la réforme, le cadre juridique de celle-ci a été rappelé aux collectivités ainsi qu’aux prestataires qui interviennent pour leur compte. 
- Tout manquement au respect de ce cadre juridique ou de la gratuité du stationnement des véhicules transportant des personnes handicapées serait susceptible de faire l'objet d'un recours et d'être sanctionné par le juge.
"

Il faut savoir qu'en parallèle de tout cela, HANDI-SOCIAL et le GIHP Midi-Pyrénées sont montés au créneau sur le sujet à l'occasion d'une présentation faite sur le dispositif LAPI par les services de Toulouse Métropole le 20 octobre 2017. À cette occasion, les seules associations à s'être opposées au dispositif et à la tentative d'obliger les personnes en situation de handicap titulaires de la carte européenne de stationnement ou de la nouvelle carte mobilité inclusion ont été les 2 associations précitées. Comme en atteste le compte rendu de la réunion reçu le 14 novembre, pour laquelle HANDI-SOCIAL a quand même dû demander de modification qui ont été validées le 19 janvier dernier.

Nous avons listé les nombreuses situations qui s'opposent à ce dispositif qui rajoute trop de complexité aux situations de vie quotidienne des personnes handicapées (voir en bas de page)

Les associations du CIAH 31 ont soutenu les positions défendues par HANDI-SOCIAL et le GIHP, et ont validé un courrier recommandé du collectif en date du 16 janvier 2018 à l'attention de Toulouse Métropole, s'opposant à la verbalisation automatique, et à un dispositif qui allait encore ajouter de la complexité au quotidien des personnes en situation de handicap et de leurs familles.
Nous nous sommes pour cela grandement appuyés sur l'article de Yanous que nous remercions de ce travail d'enquête.

Néanmoins, nous sommes très heureux que l'APF soutienne enfin cette position, et il serait souhaitable qu'elle rappelle cela à ses élus bénévoles de l'APF de Pau et d'ailleurs qui ont validé le dispositif mis en place dans cette ville et qui a obligé les palois handicapés à se déclarer en toute illégalité.

Liste non exhaustive des difficultés posées par le LAPI :
Il s’agît de complications supplémentaires pour des personnes qui ont déjà énormément de contraintes quotidiennes. Une discipline de stationnement propre à chaque ville entrainerait un recul sociétal inacceptable pour les PMR. Cela engendrerait une contrainte supplémentaire dans leur mobilité.
1. Rappel : la réforme ayant remplacé depuis le 1er juillet 2017 la Carte Européenne de Stationnement, reconnue dans toute l’Europe, par la CMI Carte Mobilité Inclusion, avec la mention stationnement, spécificité Française, a abouti à un nouveau format de carte disposant d’une puce électronique codée censée limiter la fraude et la falsification, et à la création d’un fichier central des nouvelles cartes délivrées, mais pas de centralisation des anciennes cartes. Cependant, les cartes déjà délivrées restent en vigueur jusqu’en 2026. Cette nouvelle carte ne règle pas le problème de l’usage abusif de cette carte par des tiers non autorisés.
2. Beaucoup de titulaires de la CES ou CMI ne disposent pas de moyens de communication (tél portable, ordinateur connecté, smartphone). La fracture numérique subie par cette population est particulièrement importante.
3. Les Personnes à Mobilité Réduite qui viennent sur Toulouse depuis la banlieue ou plus loin n’auront pas le réflexe approprié, ni le temps. Comment seront-elles informées ? Vont-elles devoir s’inscrire sur Toulouse même pour un usage limité ? Que feront les personnes extérieures à la métropole, au département et à la région ? Elles ne possèdent pas, selon leur niveau technique ou financier, nécessairement un équipement informatique ni même un téléphone.
4. La carte en vigueur dans les autres pays d'Europe restera valable sur le territoire Français. Que se passerat-il pour les étrangers avec une carte européenne ? Le service téléphonique sera-t-il en capacité de traduire toutes les langues étrangères ?
5. La fraude ne sera pas réduite tant les moyens de contourner le dispositif sont nombreux et variés (photocopies de cartes européennes qui resteront valables encore 10 ans, récupération de cartes de personnes décédées ou de parents et proches complaisants ou n’osant pas refuser le prêt de la carte, etc.). Les associations demandent une intensification des contrôles physiques, en tout cas de leur fréquence, par les ASVP sur les places de stationnement réservées occupées frauduleusement, en
s’assurant chaque fois que possible que la personne bénéficiaire de la carte était bien le passager ou le conducteur du véhicule avant ou après son stationnement, en lien avec la police nationale afin d’exercer les poursuites nécessaires pour fraude.
6. Lors de l’inscription ou sur le terrain, les agents ont énormément de difficultés à distinguer si une carte PMR est vraie ou fausse. Le problème restera donc le même tant qu’il n’y aura pas de système fiable d’authentification.
7. Les auxiliaires de vie intervenant auprès des personnes handicapées changent très fréquemment, alors comment s’assurer que l’auxiliaire de vie intervenant le jour d'une sortie ne soit pas différente, au dernier moment, de celle prévue au départ, en tenant compte du fait que les interventions d’auxiliaire de vie sont souvent très limitées en termes d’horaires et qu’il n’est pas possible dans ces cas-là d’assurer des démarches supplémentaires amputant le temps d’intervention ?
8. Si l’auxiliaire de vie ne dispose pas de téléphone professionnel, ce qui arrive fréquemment, quel sera son moyen d’inscription ?
9. Les auxiliaires de vie n’utilisent pas toujours les mêmes véhicules et peuvent être déployées dans plusieurs secteurs par les sociétés qui les emploient.
10. Comment éviter qu’une auxiliaire de vie, dont le véhicule aurait été déclaré, continue à utiliser ce droit, alors qu'elle n’est plus accompagnée d’une personne bénéficiaire de la carte ? Et si elle intervient plusieurs jours de suite devra-t-elle se déclarer chaque jour ?
11. Si la personne est porteuse de troubles autistiques ou nécessite une surveillance permanente par exemple et que cette personne est détentrice d’une carte de stationnement, l’accompagnant ne peut pas laisser celle-ci seule pour aller s’inscrire auprès de l’horodateur.
12. Comment seront repérés l'usage abusif d’une carte de stationnement par un tiers non autorisé, ou les faux documents ?
13. Les personnes extérieures vont devoir se déplacer pour se justifier lors de l’inscription ? Et si la déclaration passe par un simple coup de fil, comment les autorités s’assureront-elles que la personne qui s’est déclarée est bien titulaire et bénéficiaire de la carte ? Ou alors les personnes devront encore faire des courriers, des photocopies de documents ce qui complexifiera encore leurs conditions de vie.
14. Les véhicules LAPI devront rouler vite et ne pourront pas faire de contrôle visuel pour s’assurer de l’apposition des cartes de stationnement dans les véhicules. C’est donc la porte ouverte à la fraude.
15. Les listes des titulaires de CES ou CMI détenues, soit par les services de la préfecture ou bien par la M.D.P.H., ne sont pas à jour et simplement détenues localement. De plus, la MDPH ne détient que les noms des bénéficiaires des cartes, et non pas le numéro des cartes, qui est seul visible par l’agent verbalisateur. Quant à la préfecture, son fichier n’est accessible que par le numéro de carte. Il est, de ce fait, difficile de connaître le nombre de personnes concernées, et de pouvoir éventuellement les
contacter.
16. Quid des personnes déficientes visuelles qui n’ont pas de véhicules, possèdent une carte européenne à titre individuel et sont accompagnées lors d’un déplacement : comment justifier le statut d’accompagnateur puisque la carte reste dans la poche de la PMR et non dans le véhicule ?
17. Comment ferait une personne de Saint-Gaudens qui se ferait amener à Toulouse par une auxiliaire de vie au dernier moment ? Et si le véhicule de l’auxiliaire est autorisé, pour combien de temps ? Si autorisation durable, les auxiliaires, les médecins et les infirmiers, les dépanneurs et les autres vont finir par bénéficier aussi de la gratuité …
18. Comment feront les personnes non connectées avec un périmètre de marche très limité pour aller au parcmètre ?
19. Concernant les horodateurs, si la position des claviers permettant de s’identifier va être normalisée, leur accessibilité, au niveau de la voirie reste défaillante car l’aire de retournement nécessaire, pour rappel de 1,50 m de diamètre, n’est que rarement respectée.
20. Il a été demandé si l’application pourrait servir à contester les contraventions. La réponse a été négative.